Fin de garde - Partie 5 (fin)

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Hugi voulu reprendre son envol, mais Triil l'arrêta. L'insecte était tout aussi capable que lui de vérifier la nature de ces déchets, et n'avait pas eu à transporter une ourse massive et deux cadavres à toute vitesse. C'était une tâche dont elle voulait se charger. Elle voleta donc en direction des déchets suspects.

Les premiers ne lui causèrent pas de soucis. Par deux fois, elle signala à ses amis qu'il s'agissait bien d'ennemis vivants, et l'un d'eux quitta la plage pour rejoindre le point d'abordage prévisible du futur mort. C'est lors de la dernière vérification que les choses se corsèrent. Du rivage, Triil sembla happée par une vague inattendue. Hugi pris aussitôt son envol et, en quelques coups d'ailes, la rejoint, la récupéra et la ramena.

Jodanne, qui était restée seule sur la plage, faisait les cent pas tandis que l'oiseau revenait, tenant l'insecte douloureusement inerte entre ses serres. Hugi se posa sur une plaque de sable intact, et posa leur amie. Il l'avait trouvée sur ce qui avait dut être un fragment du plancher du navire. Autour d'elle, trois corps finissaient de se dissoudre dans l'acide qu'elle avait projeté. Ses élytres étaient endommagées, elles ne fermaient plus. Une de ses pattes pendait dans une position peu rassurante. Triil était encore consciente quand il l'avait atteint, mais s'était évanouie durant le transport. Elle avait eu le temps d'expliquer que les bipèdes avaient feint l'inconscience et saisie alors qu'elle approchait pour s'assurer de leur état. Elle s'était défendue vaillamment mais n'avait pas réussi à les neutraliser avant d'être gravement blessée.

L'insecte avait besoin de soins spécialisés, mais ses équipiers ne pouvaient quitter le rivage avant de s'être assurés que les ennemis étaient tous annihilés. L'aigle aida Jodanne à placer Triil sur son dos, fini le tour d'inspection qu'elle avait commencé, noya lui-même les rares survivants et alla prévenir Midel et Drion de la situation. Ils rejoignirent Jodanne et s'accordèrent sur la suite des opérations : Drion et Hugi tiendraient le poste de garde jusqu'à la nuit, tandis que l'ourse et le serpent apporteraient Triil auprès des siens pour qu'elle reçoive le traitement approprié. Ce n'était pas une situation idéale, mais il était peu probable que l'ennemi tente une nouvelle offensive avant la nuit. Et une fois le soleil couché, leur dernier tour de garde avant le printemps aurait pris fin.

Avec l'aide de Midel, Jodanne ne mit pas longtemps à rejoindre le coin de forêt où les coléoptères nichaient. Et à peine eut-elle atteint ses frontières qu'une armée d'insectes les encercla, prit la mesure des blessures de Triil et convoqua des guérisseurs pour prendre soin d'elle. L'ourse sentit qu'on l'enlevait de son dos, et se retrouva seule avec le serpent avant d'avoir pu grogner. L'hiver était trop proche à présent, ils ne sauraient rien de l'évolution de son état avant le printemps. A regrets, ils se séparèrent et rejoignirent chacun leurs foyers.

Il était tard ce soir là et Jodanne rentrait de la chasse. Elle avala un peu de poisson, embrassa ses oursons déjà endormis, se blottit contre sa compagne et sombra dans le sommeil lourd de l'hibernation. Demain serait une autre saison.

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