Mardi 27 Janvier - 1/1

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 — T'espères encore qu'ils viendront volontairement à du soutien optionnel ?

Cyrille venait de surprendre Nathan assis sur le dossier du banc en pierre blanche en face de l'Aquarium, en train de lire le Première du mois de février. La dernière sonnerie du jour avait déjà fait fuir la plupart des élèves non internes, pourtant il attendait toujours Morgane et Lex, fidèle au poste.

— Que veux-tu ? fit-il en haussant les épaules. Comme disait Rousseau l'année dernière, je crois que l'humain est fondamentalement bon par nature. Et qu'il ne me fait pas poireauter pour rien...

— Ouais, enfin ça fait quinze jours que l'humain te prend pour un con...

La rhétorique de Cyrille n'était pas dénuée d'un fond de vérité dont Nathan avait pris la mesure au fil des rendez-vous manqués les mardis et jeudis. La relation entre la punkette et le blouson noir avait eu raison de la volonté de ce dernier et des efforts de la première. Encore trois minutes et Nathan jetterait lui aussi l'éponge pour de bon.

— Au fait, continua son ami, je dois sûrement remercier ton vélo mais j'ai pu échanger quelques mots avec Elké hier...

Nathan abandonna sa lecture et arqua un sourcil interrogateur vers Cyrille.

— J'l'ai vue te quitter passablement énervée hier matin. J'me suis dit que je pouvais jouer sur la nouvelle crise pour relativiser le « Samirgate ».

— Et ça a marché ?

Le T-S* était déjà retourné à son magazine ; attendre en vain comme un idiot avait déjà bien échauffé sa mauvaise humeur, et entendre son ami faire le rapace sur le cadavre de son amitié avec Elké pour sauver sa relation ajoutait à son énervement contre le monde en général.

— On a pu discuter un peu... Elle est inquiète pour toi.

— Je lui ai rien demandé, répliqua Nathan sèchement.

— On n'est pas dupe sur c'qui t'es arrivé au visage. On pense même avoir une bonne idée sur le « qui », sans savoir le « pourquoi ». Tu sais qu'tu peux m'parler, hein ?

Nathan ne répondit rien, Cyrille continua.

— Elké et moi, on pense que la situation avec Morgane...

— Ok, c'est bon ! coupa aussitôt l'adolescent en se levant. Toi aussi tu m'soules ! Laissez-moi tranquille, bordel !

Il rangea furieusement son magazine dans son sac et se dirigea vers le parc à vélo ; son ami jugea préférable de ne pas insister et partit de son côté.

En défaisant le cadenas de sa chaîne, Nathan avait parfaitement conscience qu'il agissait comme un enfant, mais il n'arrivait pas à se contrôler, ni à contenir cette rage qui rimait - à contre-cœur - avec Morgane. Ne trouvant de solutions pour contenir son mal-être, il préférait se couper du reste du monde et le faisait brutalement savoir. Si Elké et Cyrille pensaient avoir la clé de ses problèmes, pourquoi n'intervenaient-ils pas ? se demandait-il.

Une main tapa sur son épaule. Il se retourna, prêt à envoyer paître la personne qui se sentait investie d'un bon conseil à son égard. Alice se tenait debout, un casque blanc à la main, les clés de son Vespa dedans. Elle devait s'apprêter à quitter elle aussi l'établissement quand elle l'avait vu penché sur son vélo.

— T'as pris cher, grimaça-t-elle en pointant du doigt le visage de Nathan.

— Chuis tombé de vélo...

— Mouais, c'est pas ce que raconte Fix...

Il apprécia le regard compatissant de la jeune femme, mais apprendre que cet enfoiré se gaussait de ses exploits à trois contre un n'avait rien de réconfortant.

Teenage RiotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant